Dee Spencer, après la disparition d’Aaron Harper : “Mon cœur est brisé”

Le 3 novembre dernier, le peuple roannais a eu l’immense peine d’apprendre la disparition d’Aaron Harper des suites d’un accident de voiture.

Alors que la Chorale de Roanne venait de remporter un match important contre la JL Bourg à l’extérieur, une story Instagram du coach Jean-Denys Choulet venait révéler une information tragique : celle de la mort d’Aaron Harper, à l’âge de 42 ans. Il faut dire que l’actuel entraîneur roannais connaissait mieux que quiconque l’ailier américain avec qui il a été champion de France en 2007. Ce globe-trotteur a voyagé partout dans le monde pour jouer au basket. Parti de l’Université du Mississippi, Harper a d’abord démarré d’une manière totalement inattendue en Islande et au Vénézuela, avant de débarquer en 2005 à Roanne, repéré par Jean-Denys Choulet. La suite, on la connaît. Le joueur, discret, faisait partie du trio magique US qu’il composait avec Dee Spencer et Marc Salyers. Ensemble, ils remporteront la Semaine des AS et le Championnat de France avec la Chorale en 2007. Il est revenu dans le Roannais en 2008 pour une dernière danse avec le club qui l’a mis sur orbite. Et puis Aaron Harper a repris son chemin sur les routes de la terre entière pour jouer au basket. Ukraine, Bulgarie, Vénézuela, Liban, Mexique, Argentine… L’ailier était encore un joueur de basket en 2023. Aujourd’hui, Roanne pleure l’un des siens. A l’image de Pape Badiane, capitaine de la Dream Team de 2007, décédé lui aussi tragiquement dans un accident de voiture en 2016, la Chorale est orpheline de deux de ses plus beaux représentants. Aaron Harper restera à coup sûr dans les mémoires de tous les amoureux de basket du Roannais.

Jean-Denys Choulet : “Aaron était un vrai personnage”

L’actuel entraîneur de la Chorale de Roanne a rapidement témoigné après la disparition de son ancien joueur.

Vous avez appris la disparition d’Aaron quelques minutes après le match de Bourg, comment avez-vous vécu cette terrible nouvelle ?

J-D. C. : “C’est une nouvelle terrible effectivement. L’émotion est toujours là quand j’en parle. Aaron est quelqu’un qui a fait partie de la vie de la Chorale de Roanne, même de la ville de Roanne tout simplement, et qui l’a mise au niveau national et même international avec la qualification en Euroligue.”

Vous lui avez d’ailleurs dédié la victoire face à Limoges, quelques jours après…

J-D. C. : “Malheureusement, c’est tout ce que je pouvais faire. Je n’ai pas pu me rendre aux USA pour me recueillir. J’imagine la douleur que peuvent avoir ses parents. Aaron était quelqu’un de très discret sur sa vie personnelle.”

Vous avez appris la nouvelle par Dee Spencer. Ce trio d’américains de 2007, avec Marc Salyers notamment, ce sont plus que des joueurs pour vous ?

J-D. C. : “Ce sont des gens avec qui j’ai de bonnes relations. Déjà parce qu’ensemble on a réussi. Quand Dee m’a appris la nouvelle, j’ai tout de suite appelé Marc. Il y a une vraie amitié qui nous lie ensemble. Je pense que c’est difficile à comprendre quand on a pas vécu une vie en haut niveau. On a eu une équipe en 2007 qui était hors du commun, avec ces trois joueurs américains classés sur le podium des meilleurs marqueurs de Pro A. C’est quelque chose qui n’est pas prêt de se reproduire. J’ai reçu des messages de partout, pas uniquement de notre région, suite à la disparition de Aaron. C’est une preuve que cette époque là a marqué beaucoup de monde.”

Quel souvenir allez-vous garder d’Aaron Harper ?

J-D. C. : “Aaron, c’est un sourire, des yeux toujours rieurs. Il balançait sans cesse des vannes. Le nombre d’anecdotes avec lui est inestimable, je pense que je pourrais écrire un bouquin tout entier (rires). Il y a des histoires comme ça, je pense notamment à celle de la bouteille de bière. Il m’avait dit qu’il en avait une dans son frigo et qu’il n’y toucherait pas. Il a passé une semaine à la regarder à chaque fois qu’il ouvrait son frigo. Et puis un jour il vient me voir en me disant “Coach, j’ai pas pu résister je l’ai bu”. Mais ce qui m’aura le plus marqué, c’est de le voir avec Jeannot Chaptar au salon VIP partager des verres de Ricard. Il le faisait parce qu’il en avait envie, pas pour s’attirer quoique ce soit. Et repenser à ce moment de partage entre le Champion de France 1959 et celui de 2007, c’est quelque chose qui restera gravé. C’était un vrai personnage, qui était doué au niveau du basket.”

On imagine que vos pensées en retournant chaque semaine à Vacheresse lui seront dédiées ?

J-D. C. : “Ce qui me dérange le plus, c’est que j’avais imaginé à la fin de ma carrière d’entraîneur de pouvoir réunir les trois américains à Roanne pour faire une vraie belle fête avec le public. Ce ne sera plus possible malheureusement. Quand on rentre dans la salle, forcément, ça rappelle tout un tas de choses et de souvenirs qu’on a pu vivre avec Aaron.”

Dee Spencer : “Mon coeur est brisé”

Coéquipier d’Aaron Harper en 2007, Dee Spencer nous a glissé quelques mots suite au décès de celui qu’il considère comme un frère.

“Je ne pourrais même pas vous dire ce que je ressens après avoir appris cette terrible nouvelle. Je pense que je n’arrive pas à croire que c’est réel et que cela s’est bien produit. Je suis très triste. Aaron était plus que mon ami à Roanne, un colocataire. Ces derniers jours, je continue de repenser à tous les bons moments que nous avons vécu avec la Chorale et de ce que nous avons accompli en tant que coéquipiers. Ces souvenirs resteront gravés pour toujours et j’aime me souvenir d’Aaron comme ça. Mon cœur est brisé et je pense fort à sa famille. Nous avions une relation forte. Il m’a aidé lors de mes premières années de basketteur, à Roanne et ailleurs. Si j’avais besoin de quelque chose, je pouvais compter sur lui pour m’aider. On avait beaucoup échangé et nous avions comme mission de gagner le championnat avec Roanne et nous avons eu l’opportunité de réaliser ce rêve ensemble.”

Son meilleur souvenir avec Aaron ?

“Quand nous gagnons la finale du championnat en 2007 contre Nancy, à la fin du match, nous nous étions chamaillés pour savoir qui pourrait garder le ballon de la finale. C’était une journée fantastique.”

Une pensée pour Pape Badiane

Après le choc de l’annonce du décès en 2016, déjà d’un accident de voiture, du capitaine Pape Badiane, cette nouvelle disparition vient secouer le monde du basket et plus précisément de la Chorale de Roanne. Aaron Harper était, comme Pape Badiane, dans le cinq majeur de la finale de 2007 et s’est donc aussi éteint des suites d’un accident de la route.

Photo : Olivier Fusy