Fin juillet, nous étions présents à St Etienne pour couvrir les Championnats de France Elite et nous avons eu l’immense plaisir d’échanger avec Emanuelle Chazal, heptathlonienne passionnée licenciée au CAR. C’est pourquoi nous vous offrons aujourd’hui l’opportunité de partir à la découverte de cette athlète à travers un entretien à son image, sans filtre et riche en sincérité.
Comment avez-vous vécu cet heptathlon à domicile ?
Il fallait vraiment prendre plaisir à la maison. Il y a toujours la pression à gérer sur les haies car c’est la première épreuve. Je ne faisais vraiment pas la maline avant le départ, en plus on a eu un faux départ mais au final gros soulagement après la course. Je fais une course correcte, très proche de mes records. Ensuite, j’ai fait un concours de hauteur très encourageant. Je m’étais perdue ces deux derniers mois sur la hauteur alors que j’avais fait mon record personnel cet hiver. J’ai vraiment retrouvé des sensations mais le problème est que je n’ai fait qu’1m63 et c’est frustrant parce que j’avais 1m70 dans les jambes. J’étais en manque de repères pour atteindre ce pallier mais c’est le jeu, c’est le sport. Jusqu’à ce moment-là, on avait la météo avec nous, il faisait super beau, chaud après au poids j’étais très bien à l’échauffement mais j’ai commencé à me crisper et le concours a été catastrophique avec un jet à 10m40. C’est une grosse contre performance qui me fait mal à ce moment-là et pour terminer j’ai fait mon pire temps de la saison sur 200m. Je n’ai pas vraiment compris ce qui m’arrivait, il s’est mis à pleuvoir mais ça ne me donne pas d’excuses mais ça a été compliqué, j’ai pris des risques car j’ai quand même des douleurs aux ischios depuis janvier et inconsciemment je les ai gardé en tête. Donc je quitte la première journée vraiment déçue et frustrée car je n’étais pas sur les ambitions initiales. Je pense que que la pression d’être à la maison a été compliquée pour moi au début, j’avais tellement de proches ce weekend là alors que d’habitude je suis relativement toute seule. Les copains footeux, les copains basketteurs étaient sur leurs terrains de jeu et le problème est que j’ai tellement voulu leur faire plaisir que je me suis mis une pression supplémentaire en m’oubliant moi-même.
Le samedi, je suis revenu sur les pistes avec une autre détermination et cela s’est vraiment ressenti. C’était l’apocalypse à la longueur avec de la pluie, du vent mais j’arrive à faire malgré tout à faire 5m52 à mon 2e essai avant que les parasols ne se démontent, que les spectateurs ne fuient. C’est dommage car j’étais bien, le record de la Loire (5m80) était vraiment envisageable mais je m’en sors très bien aux vues des conditions car de nombreuses filles ont fait des zéro. Je suis arrivée au javelot avec le même relâchement et je fais 36m (2e meilleure performance personnelle) malgré un temps toujours pas terrible donc on prend ce qu’il y a à prendre et on arrive au 800m, la seule épreuve où je m’étais vraiment imaginé un scénario positif avec tout le monde qui me poussait car c’est une épreuve énormément stressante pour moi que je travaille énormément mentalement et avant de partir j’avais une envie de vomir horrible mais quand on a appelé mon nom j’avais les larmes aux yeux parce que j’ai entendu tout le monde derrière moi quand je suis rentrée sur la piste tout le monde scandait mon nom et le 800m a été un kiff total. Les filles ont fait la course parfaite pour moi, je termine 3e en 2’21’82’ en entrant dans la dernière ligne droite avec une sourire jusqu’aux oreilles, ce qui ne m’étais jamais arrivé lors d’un 800m. Le tour d’honneur qui a suivi était encore plus magique, j’avais les larmes aux yeux et je me suis dis que c’est ces moments-là qu’on retiens du sport, c’est pour ces moments-là que je m’entraîne 15/20 heures par semaine. Je suis pas sûr que je les revivrais chez moi et je voulais en profiter.
Qu’avez-vous pensé de l’engouement autour de ces Championnats de France ?
J’ai trouvé que les Ligériens ont vraiment répondu présent. Il y a eu une grosse communication qui a joué pour attirer du monde au Stade Henri-Lux. Je pense que cet événement a été une réussite car il n’y avait plus de places en catégorie 1 et puis en catégorie 2 les gens n’ont pas forcément envie de venir se tremper pendant 4 heures donc c’est compréhensible. Les aléas de la météo ont certainement fait fuir quelques personnes mais il y avait quand même un public de malade.
On vous sent passionnée par votre sport n’est-ce pas ?
Je transpire l’athlé, j’aime l’athlé et j’ai envie de transmettre cette passion. Je ne suis pas encore beaucoup dans la partie coaching mais dès que j’ai un moment pour donner un coup de main pour conseiller les gamins du club je le fais avec grand plaisir. C’est juste magnifique de voir des enfants qui viennent et qui disent “c’est trop bien, je veux faire ça”. Cet événement a aussi servi à donner envie à d’autres générations de pratiquer ce beau sport qu’est l’athlétisme.
Quel est votre programme désormais ?
La saison est terminée, c’est les vacances ! On se projettera sur fin août avec tout de suite début octobre la coupe de France avec le Club Athlétique du Roannais où on s’éclate. Ce n’est pas du tout un objectif de performance mais par contre c’est de la cohésion d’équipe et après ce sera saison hivernale et estivale. On ne ressortira pas sur les pistes en intérieur en combiné avant décembre. J’ai également coché les Championnats de France à Lyon les 1er et 2 février prochains mais sinon je n’aurais pas d’objectif sur le long terme. Maintenant cela va vraiment être d’année en année avec toujours dans un coin de la tête d’inscrire mon nom sur les tablettes du record de la Loire. Mais c’est du bonus, je vais continuer tranquillement mon chemin et on verra bien.
Toujours à Roanne la saison prochaine ?
Je suis bien à Roanne, on a une super équipe, j’ai toutes les infrastructures pour bien travailler. Je tiens à remercier la Charpinière car je fais mes soins et l’essentiel de ma préparation là-bas avec Benjamin Dubois. J’ai une chance énorme d’avoir mon club, la Charpinière, BV Sport, le département, la ligue qui m’aident donc pourquoi je changerais ? Mon futur est à Roanne, je ne me prendrais pas la tête ailleurs.
Crédit photos : Nicolas Mennetrey, Manu Chapelle